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Annulation d'une adoption frauduleuse et contrôle de proportionnalité

Le 03 octobre 2019

Dans un arrêt du 13 juin 2019, la 1ère chambre civile de la Cour de Cassation soumette l'annulation d'une adoption frauduleuse au contrôle de proportionnalité in concreto.

Les faits de l'espèce étaient les suivants:

Un homme marié et père de deux enfants avait eu une liaison avec une femme rencontrée à Cuba, qu’il avait accueillie à son domicile avec sa sœur jumelle. La situation, devenue conflictuelle, avait conduit au divorce des époux, en 2004.

Puis, l’homme divorcé avait déposé une requête aux fins d’adoption des deux sœurs jumelles.

À cette occasion, il s’était abstenu de mentionner l’existence des enfants issus de son mariage, avec lesquels il était en conflit.

Le jugement prononçant l’adoption simple des sœurs jumelles a été rendu le 26 avril 2007 mais n’a été porté à la connaissance des enfants biologiques du couple qu’après le décès de leur père, le 7 mai 2013.

Dans le cadre du règlement de la succession, les filles adoptives du défunt ont assigné ses enfants biologiques en partage judiciaire. Ces derniers ont alors formé tierce opposition au jugement d’adoption, le 3 avril 2015.

La tierce opposition a été déclarée recevable par les juges du fond, qui ont rétracté le jugement du 26 avril 2007, annulé l’adoption et jugé que le nom de l’adoptant ne serait plus adjoint à celui des adoptées.

Les adoptées ont formé un pourvoi en cassation.

Selon elles, l'annulation du jugement d'adoption constituerait une ingérence injustifiée dans l’exercice du droit au respect dû à la vie familiale de l’adopté (protégé par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme) et une atteinte excessive au droit au respect des biens de l’adopté (protégé par l’article 1er du protocole additionnel).

Sur l’atteinte au droit au respect des biens, la Cour de cassation écarte l’argument en considérant que la cour d’appel a légalement justifié sa décision après avoir « fait ressortir que l’annulation de l’adoption ménageait un juste équilibre entre les intérêts en présence et ne constituait pas une atteinte disproportionnée au droit au respect des biens » des adoptées.

Sur l’atteinte à la vie privée et familiale,  la Cour de cassation procède au contrôle de proportionnalité in concreto qu’elle a inauguré en 2013 en rappelant qu’il « appartient au juge d’apprécier si, concrètement, dans l’affaire qui lui est soumise, la mise en œuvre de ce texte ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l’intéressé, au regard du but légitime poursuivi et, en particulier, si un juste équilibre est ménagé entre les intérêts publics et privés concurrents en jeu ».

Cette appréciation relève en premier lieu du pouvoir des juges du fond. C’est sur leurs constatations que la Cour de cassation s’appuie pour valider l’appréciation selon laquelle l’annulation de l’adoption ne portait pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale des adoptées.

Elle retient trois circonstances : la double fraude commise par l’adoptant (il a « sciemment dissimulé des informations essentielles à la juridiction saisie de la demande d’adoption, pour détourner la procédure à des fins successorales et consacrer une relation amoureuse ») ; la construction tardive (les adoptées, « qui étaient âgées de 22 ans lorsqu’elles ont fait la connaissance de [l’adoptant], n’ont pas été éduquées ou élevées par lui ») et conflictuelle (les adoptées ont été accueillies chez l’adoptant selon « des conditions très particulières, notamment pendant le temps du mariage et sans l’accord de son épouse ») des relations familiales consacrées par l’adoption ; la durée de la situation remise en cause par l’annulation de l’adoption (« l’adoption a été annulée neuf ans après son prononcé mais trois ans seulement après le décès de l’adoptant, date à laquelle les enfants issus de son mariage en ont eu connaissance »).

Ayant relevé l’ensemble de ces constatations, la Cour de cassation considère que la cour d’appel a pu déduire » l’absence d’atteinte disproportionnée.

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